Né le 10 décembre en 1935, à Rochefort-sur-Mer en Charente Maritime, Claude Lagoutte est mort en 1990. Il est avant tout un artiste marcheur. Sa pratique du voyage qu’il a eu jusqu’à la fin de ses jours, son goût des grandes étendues désertiques ou montagneuses, son appétence pour l’Orient, il les doit aux lectures de Pierre Loti, dont il cherche la trace à Istanbul, comme il retrouve les récits d’Eugène Fromentin dans les vastitudes algériennes.
Les longues marches de Claude Lagoutte sont à l’origine d’une toile, libre de châssis, imprégnée des pigments et terres recueillis sur son chemin. Le parcours du marcheur rythme le rouleau déployé, selon des bandes de toiles découpées, froissées, pliées et teintées puis cousues horizontalement à la machine.
C’est en 1976 que le peintre paysagiste Claude Lagoutte trouve un apaisement après s’être résolu à laisser flotter sa toile, à renoncer au châssis qui la tendait et aux contours stricts qu’il lui imposait. Le rejet des limites du cadre lui permet des extensions, des rajouts, des allées et venues, et lui donne le sentiment d’une liberté retrouvée, cette même liberté qui le pousse sur les routes, sac au dos, humant l’air en notant de manière presque obsessionnelle une coïncidence de couleur au cœur d’un champ monochrome, un champ de labour à l’étendue palpitante.
“Devant la grande inconnue du visible, il reste à travailler, non pas sur des formes, qui sont des concepts, mais sur les propres moyens de la peinture : surface et couleur” écrit Claude Lagoutte. C’est pourquoi l’oeuvre de cet artiste a été associée aux travaux du groupe “supports/surfaces“. “Mon travail consiste à commencer en haut et à finir en bas. Je commence à couper la toile en bandes et je la travaille dans la peinture en train de se faire. Ensuite je remets le tout à plat et je reconstitue avec la machine à coudre.” (1984). Le support peut être la toile, aux bandes cousues à l’horizontale en de longs rouleaux verticaux ou comportant plusieurs lès élargissant la surface dans sa largeur ou bien encore le papier, papier de riz, de soie, papier kraft, ou coupures du journal Le Monde, selon de petits formats ou de longs rouleaux étroits. Les bords de ces toiles ou papiers peints sont réguliers ou laissés libres, les extrémités se recroquevillant alors comme un tapis de feuilles mortes.
Lorsqu’il coud ou colle, Claude Lagoutte fabrique un nouveau support, recueil de son regard, mémoire des terres parcourues, de lumières obliques, de chemins poudreux.
En 1981 Claude Lagoutte expose au château de Chambord la série de toiles Talcy puis une exposition personnelle lui est consacrée à la Galerie Le Troisième Œil à Bordeaux. Malade, ne pouvant peindre à la verticale, il se met à peindre à plat sur de grandes feuilles de papier qu’il assemble. A la fin de sa vie, l’artiste retrouve la toile tendue alors que ses rythmes de triangles peints s’obscurcissent, allant du gris léger à l’anthracite. De ses nombreux séjours en Inde et au Tibet, Claude Lagoutte rapporte aussi des carnets de voyage, pliés en accordéon, qu’il illustre de dessins figuratifs à l’encre, à la manière des anciens chinois, entrecoupés de textes, commentaires sur les lieux ou réflexions sur l’art ou sur les religions.).
Sa totale indépendance l’a tenu à l’écart du monde de l’art, refusant d’entrer dans les circuits qui auraient entaché sa Vérité qu’il servait avec une conviction profonde.
Composée d’environ quatre-vingts œuvres, l’exposition rétrospective du Musée des Beaux Arts de Bordeaux, en 2008, a ainsi regroupé les longs rouleaux de plus de 10 mètres, des œuvres de dimensions moyennes, des tapisseries tissées par les ateliers d’Aubusson, des œuvres sur papier (lettres de voyages, carnets de voyages, gouaches, dessins,…) provenant de collections publiques (MNAM, différents FRAC, FNAC, Musées) et de collections privées. Des pages de ses journaux de voyage ont été édités à cette occasion.
Si vous voulez connaître les numéros de Textile/Art qui contiennent des articles sur cet artiste, tapez son nom dans le moteur de recherche.