SKILLS ACADEMY | Textiles – Le regard de quatre grands créateurs (1/4), 2019 (27'27")
ENTRETIEN et CONFÉRENCE
Courtoisie de la Fondation d’entreprise Hermès dans le cadre de son programme l’Académie des savoir-faire.
Courtesy of the Fondation d’entreprise Hermès in the framework of its Skills Academy program.
Caroline Achaintre présente ici l’évolution de son travail allant des dessins réalisés pendant ses études à l’élaboration de ses fameuses toiles tuftées. Artiste sensible à l’artisanat avec un début dans la « tapisserie » de ses laines tuftées en 2002, Caroline Achaintre s’essaie ensuite à la vannerie de bambou et d’osier en 2010 puis expérimente en 2015 sur des tissus et sur des costumes qu’elle active sous forme de performances. L’espace d’exposition est ainsi utilisé comme un théâtre où dialogue différents types de personnages hybrides et fantastiques. Les oeuvres de Caroline Achaintre sont des liquides. Sortis de ses aquarelles, les fils coulent de façon éparse, exagérant le trait inquiétant de ses productions diverses qui semblent pourtant familières. Les glissements que l’artiste opère, transposent parfois ses aquarelles et ses pastels anthropomorphiques en des sculptures textiles. L’artiste semble y avoir coupé dans la masse. Les fibres sont néanmoins distribuées au verso du tissu pour jouer des volumes et des densités à grande échelle ( dont les dimensions s’étendent souvent sur trois mètres de long et deux mètres de large). Ses oeuvres évoquent fréquemment des masques ou des fantômes dont l’artiste s’inspire à la fois du carnaval européen, du Primitivisme, de l’Expressionnisme allemand ou encore de la science-fiction. Ce mélange au sein d’une même proposition souligne la possible coexistence de plusieurs personnages dans un même être et témoigne un intérêt certain pour l’animisme. Ses ouvrages « vivants » créent ainsi une empathie avec le spectateur, proche du concept que Freud nomme l’inquiétante étrangeté. Portraitiste de l’anxiété, Caroline Achaintre joue de paradoxes étonnants entre des tapisseries lourdes qui semblent rigides et la mollesse apparente de ses céramiques.
Caroline Achaintre presents here the evolution of her work, ranging from the drawings made during her studies to the elaboration of her famous tufted canvases. Artist sensitive to craftsmanship with a start in the “tapestry” of her tufted wool in 2002, Caroline Achaintre then tried her hand at bamboo and wicker basketry in 2010 and then experimented in 2015 on fabrics and costumes that she activated in performances. The exhibition space is thus used as a theater where different types of hybrid and fantastic characters dialogue. Caroline Achaintre’s works are liquids. Out of her watercolors, the threads flow in a scattered way, exaggerating the disturbing feature of her various productions which nevertheless seem familiar. The artist’s shifts sometimes transpose her anthropomorphic watercolors and pastels into textile sculptures. The artist seems to have cut it in the thick of it. The fibers are however distributed on the back of the fabric to play with large-scale volumes and densities (the dimensions often extend over three meters long and two meters wide). Her works frequently evoke masks or ghosts inspired by European carnival, Primitivism, German Expressionism and even science fiction. This mixture within the same proposal underlines the possible coexistence of several characters in the same being and shows a certain interest in animism. Her “living” artworks thus create an empathy with the viewer, close to the concept that Freud calls uncanny. Portraitist of anxiety, Caroline Achaintre plays with surprising paradoxes between heavy tapestries that seem rigid and the apparent softness of her ceramics.